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Sur « Le jeu des perles de verre » (Hermann HESSE)

Je viens de finir ce très beau livre d’Hermann Hesse, qui m’éveille des pensées surprenantes. Il n’aurait pas fallu que je le lise avant : c’eut été trop tôt sans doute et n’aurait provoqué en moi qu’une lassitude ou, au mieux, un intérêt lointain pour l’aspect utopique…

L’histoire m’interpelle à bien des égards en ce moment et j’avoue qu’en même temps ma lecture est quelque peu « orientée » dans le sens où je cherche des réponses, des solutions à mes questions et à mes doutes. Cela dit, n’est-ce pas cette quête qui pousse à lire ?

Parfois je m’arrêtais au milieu d’un chapitre, m’interrogeant, me demandant pourquoi on m’avait enjoint à lire ce livre ; était-ce pour ce passage qui venait de me toucher, ou pour autre chose ? J’ai toujours l’impression de passer à côté du sens profond du texte, comme si je savais plus me laisser pénétrer par un livre…

Je me retrouve assez bien dans le Plinio Designori de la fin, l’homme du siècle qui revient vers Joseph Vallet, déçu de son monde et qui se fait humble pour réapprendre delui sagesse, méditation et sérenité. Je crois qu’on a tous besoin d’avoir un initiateur – du moins il arrive souvent qu’on attribue à quelqu’un, malgré lui parfois, ce rôle. Dit comme ça, ça fait un peu guide spirituel, voire gourou (mais n’est-ce pas le nom pour l’initiateur chez les bouddhistes ?). Peut-être la relation n’est-elle cependant pas si déséquilibrée, dans le cas de Vallet et Plinio tout au moins : ils sont sur un pied d’égalité, chacun ayant à apprendre de l’autre.

L’utopie de Hesse me plaît parce qu’elle montre à la fois la plénitude de la vie d’ascète, faite d’intellectualisme et de méditation, tout en convenant que cette existence-là n’est pas « vraiment » possible, pas dans la vraie vie, du moins. Elle me fait penser aux ordres monastiques médiévaux (mais les appellations utilisées le sont vraisemblablement pour susciter cette analogie) et leurs difficultés au cours des siècles à trouver leur place et leur utilité dans une société de plus en plus non-religieuse. Des mondes aussi diamétralement opposés que ceux de Plinio et de Vallet ne les empêchent pas de se comprendre, même s’ils n’acceptent pas tout. « Tu m’as énervé alors, comme je t’agaçais moi-même. Je devais naturellement te faire l’effet d’un orgueilleux Cellois dépourvu de mérite, soucieux de maintenir soigneusement les distances entre lui et un non-Castallien, joueur dilettante. Et toi, tu étais pour moi une sorte de barbare ou d’individu à demi-cultivé, qui semblait avoir des prétentions d’ordre sentimental, pénibles et peu fondées, à mon intérêt et à mon amitié. » Je me retrouve assez bien dans le barbare inculte vautré dans le siècle et incapable de s’élever un tant soit peu… et voilà que j’ai envie de corriger ça, prendre de la distance, de m’insatisfaire et de chercher un autre bonheur, pas matériel – pour ça je suis à peu près pourvue – mais plutôt « spirituel » (et le mot écorche un peu mes lèvres de cartésienne)…

D’aucuns pourront penser que je vire au mysticisme ; je ne pense pas en arriver là. Je suis trop rationnelle pour ça. J’ai envoie d’explorer cette voie, me donner une chance, y prendre ce qui me convient… mais je ne sais pas si j’y suis prête. J’ai soif de solutions mais cette soif peut paraître superficielle, plus attisée par la curiosité que par une véritable remise en question de soi. Il y a toute une partie de moi qui refuse le spirituel, le paranormal, le non-scientifique. Alors ne serait-ce pas le début d’une quête vaine ?

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