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[Braconnage] L’ombre du vent / Carlos RUIS ZAFON

Six ans après, l’absence de ma mère était toujours pour moi un mirage, un silence hurlant que je n’avais pas encore appris à faire taire à coups de mots.

Chaque livre, chaque volume que tu vois, a une âme. L’âme de celui qui l’a écrit, et l’âme de ceux qui l’ont lu, ont vécu et rêvé avec lui.

Rien ne marque autant un lecteur que le premier livre qui s’ouvre vraiment un chemin jusqu’à son coeur. Ces premières images, l’écho de ces premiers mots que nous croyons avoir laissés derrière nous, nous accompagnent toute notre vie et sculptent dans notre mémoire un palais auquel, tôt ou tard – et peu importe le nombre de livres que nous lisons, combien d’univers nous découvrons – nous reviendrons un jour.

Cette après-midi de brume et de crachin, Clara Barcelo me vola le coeur, la respiration et le sommeil. Profitant de la lumière ensorcelée de l’Ateneo, ses mains écrivirent sur ma peau une malédiction qui devait me poursuivre pendant des années.

Le cœur d’une femme est un labyrinthe de subtilités qui défie l’esprit grossier du mâle à l’affut.

L’homme le plus sage que j’ai jamais connu, Fermin Romero de Torres , m’avait expliqué un jour qu’il n’existait pas dans la vie d’expérience comparable à celle de la première fois où l’on déshabille une femme. Dans sa sagesse, il ne m’avait pas menti, mais il ne m’avait pas non plus dit toute la vérité. Il ne m’avait rien dit de cet étrange tremblement des mains qui transformait chaque bouton, chaque fermeture en travail de titan. Il ne m’avait rien dit de la magie de la chair pâle et frémissante, du premier frôlement des lèvres, ni du mirage qui semblait flamber dans chaque pore de la peau. Il ne m’avait rien mentionné de tout cela parce qu’il savait qu’en le faisant il parlerait un langage de secrets qui, à peine dévoilé, s’enfuiraient à tout jamais.

J’avais dix-sept ans et j’avais la vie à fleurs de lèvres.

Seul un homme qui n’a plus qu’une semaine à vivre peut gaspiller son temps comme je le fis ces jours-là.

Il n’y a pas de seconde chance, sauf pour les remords.

Il parlait de toi comme d’un fils. Vous vous cherchiez l’un l’autre, Daniel. Il voulait croire que ton innocence le sauverait de lui-même.

L’art de la lecture meurt de mort lente, c’est un rituel intime, un livre est un miroir où nous trouvons seulement ce que nous portons déjà en nous.

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