- Un monde tourne dans ma tête. Il me fait souffrir comme un damné. Je n’ai pas d’autre choix : il faut que je raconte à quelqu’un – ou peut-être seulement à moi-même – ce que je sais des aventures de l’être et de l’ordre des choses. Je cède malgré moi à la nécessité. Les hommes se débattent dans les ténèbres. Ils ont le droit d’être instruits des mystères dont ils sont les jouets. Chaque jour, désormais, dans ce cahier d’écolier, j’écrirai quelques mots pour éclairer mes gouffres qui sont aussi les vôtres.
- La science remonte jusqu’aux premières secondes de l’univers, quinze milliards d’années avant toi. Elle règne sur ton monde et ta vie et te révèle presque tout du « comment ? » des origines. Elle n’a pas progressé d’un pouce dans la découverte du « pourquoi ? ».
- L’éternité n’est pas un temps interminable : c’est une absence de temps.
- Le sage – et le savant – est celui qui s’étonne de tout. Et d’abord de l’évidence.
- L’avenir est menaçant parce que vous ne le connaissez pas et qu’il va arriver. Et ce qu’on ne connait pas est toujours inquiétant. Et le passé est cruel parce que vous l’avez connu et qu’il vous a quitté à jamais. Et tout le désespoir du monde est dans ces mots : « à jamais ».
- Vivre, c’est commencer à mourir. Les vivants meurent parce qu’ils vivent et ils se reproduisent parce qu’ils vont mourir. Ils vivent pour mourir et ils meurent parce qu’ils se reproduisent. Entre le sexe et la mort, j’ai noué des liens si étroits qu’ils éclairent d’une lumière sombre tout ce qui se rapporte à la Vie.
La création du monde / Jean D’ORMESSON
— Publié dans
Envie de réagir ? Laissez un commentaire !