Cette semaine, on parle gros sous ! Mes deux derniers billets sont entrés en résonance avec l’actualité récente de la vie littéraire : les revenus des auteurs. Alors, combien gagne un écrivain ? Je lève le voile… en tout cas pour ce qui me concerne.
La récente polémique #payetonauteur (relative au refus des organisateurs du Salon Livre Paris de rémunérer équitablement les auteurs intervenant sur le salon) a permis au moins de mettre sur le devant de la scène la question du salaire des écrivains. Contrairement à ce que beaucoup pensent, l’auteur n’est pas un fainéant payé une fortune pour coucher trois mots sur un clavier (bon, ça existe, mais ce n’est quand même pas la majorité !).
La semaine dernière, j’ai écrit pour le site d’Anaïs Vivre de ses romans un article où je donnais mon avis sur la plateforme d’auto-édition Librinova. La semaine précédente, en vous présentant mes outils d’écriture, j’ai dévoilé le tableau avec lequel je suis chaque mois mes revenus d’écrivain. Sur ce tableau, j’ai flouté volontairement les sommes reçues.
Ce n’est pas parce que j’ai des choses à cacher, mes revenus d’auto-édition et droits d’auteurs sont déclarés en bonne et due forme (enfin j’espère !) aux impôts. C’était plutôt parce que je ne voulais pas balancer des chiffres bruts sans explication. Aujourd’hui, je lève le voile sur ce que « ça rapporte » l’écriture (spoiler : en fait, pas encore grand-chose !).
Combien je touche sur la vente d’un livre ?
Livres numériques (ebooks)
Mes ebooks sont commercialisés via Librinova sur des librairies en ligne (Amazon, Fnac.com, Cultura.fr, etc.). Sur le prix hors taxe (TVA à 5,5%), ces librairies prennent environ 30% de commission, Librinova prend 10% (au titre du programme Agent littéraire) et me reverse le reste. Mes 3 romans auto-édités (Oraison pour une île, Petite Mouette et Les Ombres de Brocéliande) sont vendus 2,99€ TTC sur lesquels je touche donc 1,78€ par exemplaire vendu.
Pour Le Vent des Lumières, il s’agit de droits d’auteurs qui me sont versés par l’éditeur City Editions. L’ebook est vendu 13,99€ TTC (j’en conviens, c’est très cher, mais je n’ai pas eu mon mot à dire !). L’éditeur me verse 15% de droits d’auteurs sur le prix hors taxe, donc je touche à peu près 2€ par ebook vendu.
Les ventes en numérique représentent l’essentiel de mes revenus d’écrivain (90%).
Livres papiers
Sur les livres auto-édités, je touche entre 2,50€ et 3€ en fonction du prix de vente (entre 9€ et 12€) : le reste va à la plateforme d’impression à la demande pour couvrir les frais de fabrication du livre et la commission de la plateforme (CreateSpace ou BoD).
Pour Le Vent des Lumières, je touche là aussi des droits d’auteurs : entre 8 et 15% en fonction du volume des ventes. En fait, l’éditeur m’a déjà versé une avance sur mes droits (on appelle ça un « à-valoir ») : j’ai ainsi eu 3000€ (- 20% de commission d’agent de Librinova soit 2400 €) de la part de City Editions pour les ventes du premier tirage du roman (après, charge à l’éditeur de rentrer dans ses frais !).
Je gagne combien avec mes romans ?
Mes chiffres de vente
Voici un tableau simplifié de mes ventes et des revenus d’écrivain depuis que j’ai publié mon premier roman, en août 2015 (vous voyez, je ne cache rien !).
Ventes (ebooks + papiers) |
Revenus nets (imposables) | |
septembre- décembre 2015 (auto-édition) |
1262 |
1 370 € |
2016 (auto-édition) |
4227 |
6 596 € |
2017 (auto-édition) |
3251 |
4 698 € |
Brut de pomme, comme ça, ça parait énorme (quand on reçoit la somme sur son compte aussi, j’avoue !). Mais sur 28 mois, cela représente 538 € par mois. C’est une moyenne car les ventes sont fluctuantes en fonction des périodes : certains mois vont rapporter 1000€ et d’autres 70€ !
Je précise que l’ensemble de ces revenus d’écrivain sont déclarés et que je paye donc des impôts dessus.
Pas de quoi faire un salaire !
Pour vous donner une idée, 538€, ça fait un peu plus de 40% d’un Smic net à 39h. En introduction de ce billet, je disais que l’écriture ne rapportait « pas grand-chose ». Il faut relativiser : pour quelqu’un qui n’a pas de revenus (ou de faibles revenus), c’est déjà une belle somme. Mais c’est loin d’être le pactole quand même, surtout que le ventes sont très aléatoires et cycliques.
Un peu de réalité : 41% des auteurs considérés professionnels gagnent aujourd’hui moins que le SMIC #payetonauteur
— Samantha Bailly (@Samanthabailly) 4 mars 2018
J’ai la chance d’avoir un boulot bien payé et je ne peux donc pas encore compter remplacer mon salaire par mes revenus d’écriture. Pour l’instant, ces revenus sont donc du bonus… mais c’est aussi une juste rémunération de mon travail d’écriture.
Des revenus qui ne tombent pas du ciel
En effet, il faut se rappeler surtout que ces revenus ne sont pas de l’argent facile qui tombe du ciel sans rien faire. Ces sommes ont été générées par la vente de 4 romans. Or, ces romans, il faut les écrire, les corriger, les promouvoir, etc. Bref, c’est du travail.
Même quand on fait une séance de dédicace, un salon, une intervention dans une école, une médiathèque, c’est du temps que l’on passe en tant qu’auteur. C’est du travail (et c’est la raison pour laquelle les auteurs réclamaient rémunération au Salon du Livre à Paris).
L’écriture d’un roman me prend en moyenne entre 12 et 18 mois, quant à la promotion, c’est un travail quotidien, surtout en auto-édition où l’on est seul à bord. J’estime donc que je n’ai pas volé cet argent, je ne l’ai pas gagné honteusement non plus, bref, que je le mérite !
Contrairement à ce que l’on croit aussi souvent, les revenus d’un écrivain en auto-édition sont plus intéressants, financièrement parlant, que via l’édition traditionnelle. Donc signer un contrat d’édition n’est pas forcément synonyme de jackpot. Il s’agit plutôt (à mes yeux en tout cas) d’une certaine reconnaissance professionnelle (et de talent ?).
Non, je ne vis pas de mes romans
Je ne vis pas de mes romans, mais j’espère bien y arriver un jour ! J’aimerais en tout cas pouvoir générer suffisamment de revenus pour pouvoir travailler à temps partiel, voire pour arrêter mon activité salariée et me consacrer entièrement à l’écriture. Je n’y suis pas encore, mais Rome ne s’est pas faite en un jour…
Cela dit, pour pouvoir générer plus de revenus issu de l’écriture, il faut écrire plus, pour écrire plus, il faut du temps, pour libérer plus de temps, il faut gagner plus d’argent… c’est le serpent qui se mord la queue !
J’avais envie de faire ce billet d’une part pour être transparente et d’autre part pour montrer qu’être écrivain n’est pas forcément synonyme de best-seller et de grosse fortune. Les écrivains qui vivent effectivement de leur plume ne sont pas si nombreux que ça. Sans parler de la situation des auto-édités (auteurs indépendants) qui ne sont pas vraiment reconnus et qui n’ont pas de statut (fiscal, social, juridique) bien défini. Mais ça, c’est une autre histoire !
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