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À la découverte des lieux des Lumières d’Amérique

Dans mon dernier roman historique, Les Lumières d’Amérique, on voyage encore beaucoup, dans le sillage de l’héroïne Éléonore, mais aussi dans celui de son mari Olivier et de ses enfants. De l’Amérique à Bordeaux en repassant par Paris et Haïti, mes personnages ont la bougeotte et moi, je me suis bien amusée à explorer ces endroits par documents interposés. Je vous emmène donc à la découverte des principaux lieux des Lumières d’Amérique, avec des extraits et des photos.

La Louisiane

Dans les années 1800, la Louisiane n’était pas le tout petit état américain autour de l’embouchure du Mississipi. C’était un immense territoire qui représentait 22% de la surface actuelle des États-Unis.

La Nouvelle-Orléans

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La Nouvelle-Orléans en 1852 par J.W. Hill & Smith (source).

D’abord, Éléonore et Olivier s’établissent à La Nouvelle-Orléans, qui était à l’époque un port franc vers lequel affluaient les colons français de Saint-Domingue dès les premiers combats de la révolution haïtienne. Fondée par des Français au XVIIe siècle (d’où son nom et sa culture très francophone), la ville est stratégiquement très importante.

Elle contrôle en effet l’embouchure du Mississipi et joue un rôle prépondérant pour le transports des marchandises vers le nord, en suivant le fleuve jusqu’aux montagnes des Appalaches. L’agglomération de l’époque est aujourd’hui ce qu’on appelle Le Vieux Carré Français, car le plan était un quadrilatère avec des rues à angle droit.

Centre commercial actif, elle servait de plaque tournante d’exportation des peaux et fourrures issues de la traite et de tabac, de canne à sucre et d’indigo provenant des plantations. Une importante flottille de pirogues, de bateaux à fond plat, de barques côtières et de bricks reliait la bourgade aux grands ports du Mexique, de Saint-Domingue et des Antilles. La ville, peuplée en majorité de Français, de Noirs et d’autochtones qui parlaient français ou créole, proposait également une intense vie culturelle avec plusieurs théâtres. Il n’en avait pas fallu plus pour séduire Éléonore et Olivier, malgré le climat tropical et les terres marécageuses : ils avaient rapidement trouvé une maison à louer, presque neuve et construite dans le style colonial espagnol.

Les Lumières d’Amérique, chapitre 7.

Saint-Louis, Missouri

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Le manoir Chouteau, fondateur de Saint-Louis, au bord du Missouri (source Missouri History Museum).

Un autre lieu important dans l’histoire des personnages des Lumières d’Amérique est la petite ville de Saint-Louis, fondée en 1764 également par des Français. Située à la confluence des fleuves Missouri et Mississipi, c’est le point de départ de l’expédition Lewis et Clark, en 1804, ce qui lui vaudra le surnom de « porte vers l’Ouest ».

À cette époque, la ville ne compte qu’un millier d’habitants et appartient au pays des Illinois. Il s’agissait d’un centre commercial pour le négoce des fourrures. C’est à Saint-Louis qu’aura également lieu la cérémonie des trois drapeaux, les 8 et 9 mars 1804, pour symboliser la passation de la Louisiane de l’Espagne à la France, puis aux États-Unis. Charlotte, la fille aînée d’Éléonore, s’y établira à son tour.

La région de Saint-Louis se tapissait au contraire d’immenses plaines fertiles, de forêts et de champs de blé. La ville en elle-même se trouvait à flanc de colline, avec une vue magnifique sur la rivière. Prospère, elle réunissait environ deux cents maisons construites en pierre dans un style très français et se répartissant de part et d’autre de deux longues rues parallèles, protégées par un fort, un bastion et cinq tours rondes. On trouvait aussi une cordonnerie, une tonnellerie, un armurier et un moulin alimentant deux boulangeries, sans oublier les tanneurs et un potier. Le Mississippi servait à la fois de route commerciale et de source d’eau potable.

Les Lumières d’Amérique, chapitre 24.

L’ouest américain

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Lewis devant les grandes chutes du Missouri (source peinture Split Rock Studios, collection Lewis and Clark Trail Heritage Foundation).

L’achat de la Louisiane par les USA en 1803 marque le début de la conquête de l’ouest ou plutôt des premières grandes explorations au-delà des Appalaches. En 1804, le président Jefferson missionne les capitaines Lewis et Clark pour mener une grande expédition scientifique d’exploration de l’ouest américain. Il s’agit de remonter le Missouri jusqu’à ses sources, puis de rallier le Pacifique. L’idée sous-jacente est de voir s’il est possible de créer une liaison fluviale entre les deux côtes américaines.

L’expédition, composée d’une quarantaine de membres, part de Saint-Louis en mai 1804 et y revient en septembre 1806, après avoir rencontré plus de 50 tribus amérindiennes. Elle a favorisé le commerce de peaux, le recensement de centaines d’espèces animales et végétales, mais aussi lancé le processus de colonisation vers l’Ouest.

— Au fur et à mesure que nous approchions, le bruit agréable de chute d’eau se transformait en rugissement, raconta-t-il quatre jours plus tard à Clark et à Charlotte, suspendus à ses lèvres. La rivière faisait au moins trois cents mètres de large. J’ai pris position au sommet de rochers d’environ vingt pieds de haut, en face du centre des cascades, et je suis resté quatre heures à les contempler pour décrire et dessiner le spectacle grandiose et sublime qui s’offrait à moi. J’étais à la fois émerveillé et inquiet.

Les Lumières d’Amérique, chapitre 32.

Saint-Domingue devenue Haïti

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Saint-Domingue devient la république d’Haïti le 1er janvier 1804, après une guerre civile féroce qui fera des milliers de victimes et décimera les troupes françaises envoyées sur place par Napoléon. Olivier s’implique dans ce conflit et y retrouve son ancienne maîtresse Estazée.

Haïti est la partie orientale de l’île d’Hispaniola, l’autre partie devant donner naissance plus tard à la République Dominicaine. Ancienne colonie française, Saint-Domingue était aussi la plus riche et la plus prospère, fournissant à la métropole le sucre, le café et l’indigo. Mais les esclaves, dix fois plus nombreux que les Blancs, se soulèvent à partir de 1791 et obtiennent l’indépendance en 1804, donc. Le nom d’Haïti est celui de l’île au temps des Indiens Caraïbes, les premiers autochtones.

Olivier de La Ferrière débarqua à Saint-Domingue en février 1802, dans le port du Cap-Français où Charles Leclerc avait établi son poste de commandement. Le beau-frère de Bonaparte dirigeait le corps expéditionnaire envoyé par la France deux mois auparavant pour endiguer la rébellion des gens de couleur menée par le gouverneur de l’île lui-même, Toussaint Louverture. Composée de vingt mille hommes, d’une vingtaine de frégates et de trente-trois vaisseaux de ligne, la flotte avait déjà pris position sur plusieurs points de la côte, du Cap-Français à Port-de-Paix. Elle s’était heurtée aux troupes que Toussaint avait déployées au nord, à l’ouest et au sud. Lorsque les Français avaient débarqué, les rebelles s’étaient retirés dans les montagnes de l’Artibonite, entre les villes des Gonaïves et de Saint-Marc, après avoir incendié les villes littorales, pratiquant la stratégie de la terre brûlée souvent utilisée par les esclaves marrons[1] d’antan.


[1]. Un esclave marron était un esclave en fuite. On utilisait aussi le verbe « se marronner ».

Les Lumières d’Amérique, chapitre 8.

Paris et Bordeaux sous l’Empire

Éléonore et Olivier ne font pas que partir à la découverte de nouveaux lieux outre-atlantique dans Les Lumières d’Amérique. Ils passent aussi du temps en France, principalement vers la fin du Premier Empire.

Napoléon et Paris

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La fontaine et la place du Châtelet en 1810, par Etienne Bouhot (musée Carnavalet, Paris).

Paris est désignée comme capitale de l’Empire par Napoléon et compte alors près de 550 000 habitants. L’empereur y fait construire des monuments à sa gloire : l’arc de triomphe de la place de l’étoile et celui du carrousel du Louvre, le pont d’Iéna, l’église de la Madeleine, le palais de la Bourse… Il fait aussi édifier de nombreuses fontaines pour alimenter la capitale en eau, des égouts, des cimetières et des quais. Enfin, il réorganise la voirie et réglemente la numérotation des maisons.

L’étudiant longea la Sorbonne et le jardin des plantes avant de remonter la Seine vers la cathédrale Notre-Dame en sillonnant le Quartier latin. Il traversa le fleuve sur le pont d’Arcole pour aboutir sur l’ancienne place de Grève qui avait vu tant de sang couler lors de la Révolution après avoir été le théâtre des exécutions publiques depuis le Moyen Âge. Il arriva enfin à l’hôtel de ville de Paris qui abritait les institutions municipales depuis 1357[1]. Dans la salle des fêtes, réplique « républicaine » de la galerie des Glaces du château de Versailles, le jeune homme ne put retenir une exclamation admirative. Les colonnes en enfilade supportaient des plafonds richement décorés dont les ors reflétaient les rayons du soleil. Chapeautés par leur professeur, les polytechniciens furent présentés aux personnalités publiques présentes, avant d’écouter les discours institutionnels.


[1]. Détruit en 1871, l’édifice sera reconstruit presque à l’identique et agrandi en ajoutant deux pavillons aux extrémités du corps central d’époque de la Renaissance.

Les Lumières d’Amérique, chapitre 61.

Bordeaux

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Le port de Bordeaux à la fin de la Révolution, par Pierre Lacour (musée de Bordeaux).

Éléonore a construit une partie de sa vie à Bordeaux, dans le sillage du duc de Flogeac, son premier mari. Elle y revient dans Les Lumières d’Amérique, mais c’est surtout Alexandre, le fils issu de ce premier mariage, qui s’y établit et poursuit les affaires de grand négoce maritime et d’armement de ses parents.

La Révolution a néanmoins ralentit le grand commerce et la ville avait perdu en habitants, mais l’industrie s’est développée, notamment dans le textile.

Le bateau s’arrêta au milieu de la Garonne, face au port des Chartrons et de Bacalan, dans l’habituelle forêt de mâts des navires alignés sur trois rangs. L’œil averti d’Éléonore remarqua aussitôt qu’il y avait moins de vaisseaux de fort tonnage que naguère. Les immeubles de trois ou quatre étages en pierre blanche et les maisons des négociants étrangers toisaient toujours le fleuve, avec en rez-de-chaussée les bureaux réservés aux affaires et les niveaux supérieurs pour le maître et sa famille. Les ouvriers déchargeaient les navires grâce à des allèges et des chariots attelés de mules, d’ânes et parfois de chevaux. L’agitation continuelle créait un bruit assourdissant mêlant les cris des charretiers, des bateliers et des fardiers à ceux des bêtes de somme. Au-delà des barrières, légèrement à l’écart du tumulte du fleuve, quelques groupes d’hommes et de femmes richement vêtus « chartronnaient » en se promenant comme s’il s’agissait d’un spectacle habituel. Le massif hôtel de l’ancien consul des États-Unis Fenwick, construit pendant la Révolution, imposait toujours sa façade à huit travées et ses deux lanternons servant d’observatoire au maître des lieux. Un peu plus bas, des charpentiers de marine radoubaient des canots tandis que les ouvriers s’affairaient autour d’une autre embarcation. Un travailleur surveillait le goudron qui serait appliqué pour calfater les joints avec de l’étoupe, pendant qu’une fillette et sa mère ramassaient les copeaux de bois.

Les Lumières d’Amérique, chapitre 39.

La Virginie

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L’arrivée à la plantation de Prestwould, en Virginie (capture d’écran Google Maps).

C’est en Virginie, l’État américain le plus peuplé de l’époque, qu’Éléonore et Olivier débarquent avec leurs enfants en 1799. Ils rendent visite à George Washington, ancien président des États-Unis, en retraite dans sa plantation de Mount Vernon, au bord du fleuve Potomac.

Ensuite, ils gagnent la plantation de Prestwould où Olivier y a installé Mathieu et Louise de Chaulanges, son beau-frère et sa belle-soeur. Ce domaine existe toujours et c’est un monument classé qui se visite encore aujourd’hui, pour donner un bel aperçu de comment s’organisait une plantation virginienne au XIXe siècle.

Depuis le matin, la piste caillouteuse se déroulait devant la voiture comme un ruban interminable, au milieu de vastes étendues boisées aux teintes multicolores. Le vert virait à l’orange, au rouge et au pourpre, se mêlant aux décolorations de la terre et des herbes folles. L’air embaumait la résine de pin et l’humus tandis que l’été indien habillait la forêt de Virginie de tons somptueux qu’Éléonore ne se lassait pas de découvrir. Les paysages lui rappelaient inéluctablement ceux de la Bretagne, si l’on exceptait les immenses plantations de tabac, de canne à sucre et de coton. Mais elle retrouvait les grands chênes, les châtaigniers, les frênes et les hêtres, dont les feuilles commençaient à tomber en volutes mélancoliques sur le chemin défoncé. L’autre différence notable résidait dans cette impression qu’en Amérique, tout était démesuré.

Les Lumières d’Amérique, chapitre 3.

Roscoff

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Roscoff vu de la petite jetée au XIXe siècle (par Félix Benoist, La Bretagne contemporaine, tome Finistère, 1867, Domaine public).

Le port de Roscoff est situé en Bretagne, sur la côte nord du Finistère. Il fait face à l’île de Batz et constituait l’un des points de chute préférés des contrebandiers et des marins en provenance d’Angleterre. En effet, il suffit d’une quinzaine d’heures de traversée à la voile pour rallier les deux côtes.

Le village regroupait environ trois mille habitants, principalement des pêcheurs, des maraîchers et des marchands. La municipalité était connue pour être constamment en rébellion contre l’administration centrale, Roscoff étant l’un des ports les plus importants pour le trafic de l’eau de vie et du thé, en relation avec Bordeaux (pour l’alcool) et Lorient (pour le thé en provenance de Chine et transporté par la Compagnie des Indes).

Les ajoncs et la bruyère couvraient la lande bretonne hérissée de rocs granitiques tapissés de lichens. Lorsqu’ils arrivèrent, la mer et le ciel se confondaient, battus par les vents sous un plafond de nuages gris. Sur les quais du port, on distinguait à peine les contours de l’île, pourtant distante d’un petit kilomètre. Roscoff était un havre de corsaires et de contrebandiers dont l’estran était balayé par des marées de fort marnage.

Les Lumières d’Amérique, chapitre 43.

Les pontons anglais

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Le HMS Discovery, navire de la Royal Navy converti en ponton de 1818 à 1834 (source).

Dernière découverte des lieux des Lumières d’Amérique, les pontons anglais sont en réalité de vieux navires désaffectés et maintenus à flots pour servir de prison, en Angleterre. La Royal Navy y détenait les marins capturés et les lieux étaient connus pour être de véritables mouroirs, insalubres, froids et humides.

Généralement, les officiers ne séjournaient pas longtemps dans les pontons, car ils étaient rapidement échangés contre rançon. Mais ce n’était pas toujours le cas. Les principaux pontons se trouvaient à Plymouth et Chatham. Le principe du ponton a aussi été utilisés en Espagne (Cadix), à Nantes ou à Rochefort.

Les anciens vaisseaux de ligne démâtés, étaient ainsi embossés dans un coin reculé de rade, de préférence où les marées ne découvraient qu’une vase collante que les oiseaux de mer ne fréquentaient même pas pour éviter de s’y enliser. Les captifs s’entassaient dans les batteries et dans les ponts de la partie la plus basse du navire et donc la plus humide. Ces geôles infâmes, gardées par des marins anglais entrés dans les rangs pour échapper à la corde[1], étaient commandées par la lie des officiers britanniques, violents, cupides et débauchés.


[1]. Le juge laissait aux coupables de grands crimes le « choix » entre devenir soldat dans la Royal Navy… ou être exécuté.

Les Lumières d’Amérique, chapitre 41.

J’espère que cette découverte des principaux lieux des Lumières d’Amérique vous a plu et donné envie de lire mon dernier roman historique. Vous pouvez retrouver le format broché et le format numérique sur la page dédiée aux Lumières d’Amérique !


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